Où est Emy? [Maxence] Terminé

Quelle joie de revoir la lumière du jour ! Non pas qu’elle aille été enfermée dans une cave durant son séjour au dispensaire, mais rien ne valait les rayons du soleil au dessus de sa tête au lieu des néons qui faisait un bruit d’enfer, dans sa chambre d’hôpital. Elle avait bien besoin du soleil, du vrai, pour se redonner des couleurs. Prenant le peu d’affaire qui lui avaient été rapporté par le charmant mais un peu effrayant mécanicien prénommé Sam, elle regarda une dernière fois son reflet dans le miroir de la salle de bain de sa chambre d’hôpital. Les yeux moins cernés qu’à son arrivée, elle avait cependant ce pansement ridicule qui lui mangeait la moitié du front ! Heureusement, ces cheveux étaient à la bonne longueur pour pouvoir laissé retomber devant cette immonde compresse, une belle mèche de ses cheveux blonds.

Après avoir remercié les infirmières, qu’elle connaissant depuis déjà des années mais qui semblaient ne pas la reconnaitre, elle sortie enfin de cet endroit aseptisé. Elle avait tout fait pour ne pas repenser à ce qui avait pu se passer durant ces quelques jours à l’hôpital, à toute cette bizarrerie qui tournait autour d’elle, à ce Roscoe tellement différent et semblable à la fois. Adjoint du shérif, elle n’en revenait toujours pas ! Mais elle était contente de le voir vivant.... Mais cela lui faisait également beaucoup de mal de le voir si indifférent, il ne semblait pas la reconnaitre. Elle n’avait pas revu ce cher Roscoe depuis cette fameuse déposition et elle avait cru avoir déliré. Shootée avec les analgésiques, à cause de sa blessure à la cuisse, elle pensait vraiment avoir hallucinée mais elle avait bien vu le nom porté au rapport qu’elle avait du signé : Roscoe T. Hills, il n’y en avait pas trente-six mille à New Carby !

Les premiers rayons du soleil lui firent un bien fou, elle respira le grand air de son Arizona natale et son regard se posa sur le Carby Grill. Dans cette ville qui l’avait quasiment reniée, et qui semblait par certains aspects, la renier toujours, un seul endroit lui redonnerait le sourire. Combien de fois avait-elle poussé les portes de chez Emy, commandant sa fameuse tarte poire&chocolat. Elle s’y dirigea avec entrain, reconnaissant au passage des visages connus et d’autres pas. En 6 ans d’exil à Boston, la ville avait changée, les gens avaient changés, certains étaient partis et d’autres étaient arrivés, ou revenue, comme elle ! Poussant la porte de l’établissement, une vague de chaleur l’envahi au moment où elle entra dans cet endroit chaleureux. Rien n’avait changé ici : la même ambiance, les mêmes musiques, le même mur des starlettes d’en temps. Depuis son retour à New Carby, c’était la première fois qu’elle ressentait ça ; l’impression de rentrer chez elle, de revenir à la maison. Rien n’avait changé chez Emy... Mis à part celui qui se tenait derrière le comptoir et qui n’était pas du tout Emy.

L’homme à la barbe de quelques jours, et à la carrure impressionnante avait un petit quelque chose... Maureen ressentit une impression de déjà-vu, mais pourtant elle n’arrivait pas à rassembler ses souvenirs. Il avait dans les traits un petit quelque chose de familier, de familier avec Emily, celle que Maureen aurait voulu trouver à sa place. Elle sourit à l’homme et alla s’asseoir au comptoir, prenant la peine de vérifier si ses cheveux couvraient bien son pansement, puis elle se racla la gorge et demanda :

- Excusez-moi, Emy n’est pas là ?

La journée commençait plutôt mal pour l'ancien boxeur. Il faisait beau dehors, mais tenir un restaurant n'était pas aussi facile qu'enfiler des gants de boxe. Maxence avait beau encore avoir l'aide de Dolorés, la matinée avait été difficile même quand on se lève à cinq heures du matin. Il avait loupé la livraison et il avait du lui même aller récupérer les vivres. Le beau brun avait passé le reste de la matinée à chercher comment allumer les bruleurs. Pour le reste, faire la cuisine en amateur chez lui à New York était complètement autre chose que nourrir une petite ville.
Il avait loupé les cinq premières tartes, qui avaient brûlés sans avoir la moindre chance de pouvoir les récupérer. Le beau sportif avait eu encore moins de chance avec la friteuse, son beau tablier blanc était recouvert de tache d'huile. Mais celui qui avait le plus souffert c'était le torchon qui avait prit feux. Maxence se baladait donc avec sur les épaules un torchon à moitié carbonisé. Il avait de l'énergie à revendre même s'il commençait à avoir des douleurs au cœur.

La vie de boxeur était bien terminé pour lui, ses dernières analyses montraient une faiblesse au niveau de son cœur. Il avait gardé pour lui ce secret même pour son nouveau compagnon. Max avait des médicaments à prendre à heure fixe et ses prochaines analyses seraient pour dans deux mois. Il espérait une amélioration, et en attendant il fit juste une pause pour s'enfermer dans les toilettes. Le beau brun avala d'une traite ses médicaments et passa un peu d'eau sur sa nuque brulante. On venait de commander trois cafés et deux tartes aux pommes quand il vit entrer une jeune fille blonde plutôt mignonne.
Elle venait de lui sourire, il lui répondit avant de remarquer son pansement. Il passa son torchon sur son autre épaule avant de servir du café aux deux routiers au comptoir. Cette jeune fille avait quelque chose de familier mais pourtant c'était une étrangère pour le nouveau propriétaire. Elle alla s'installer au comptoir, et il se rapprocha.

- Excusez-moi, Emy n’est pas là ?

Maxence s'arrêta comme coupé en plein élan. Cela lui faisait de la peine pour cette charmante jeune fille car elle ne devait pas être au courant du décès de sa grand-mère. Il ne la connaissait pas mais il osa poser une main sur celle de la nouvelle venue.

-Vous voulez voir Emy ? Vous pouvez venir à côté ? Il montra le bout du comptoir.

Il lâcha sa main et l'invita du regard à le suivre. A l'autre bout du comptoir, il avait pas les regards et ils pourraient être tranquilles. Maxence se racla la gorge ne savant pas trop comment dire les choses, même à une inconnue. Il se rapprocha pour venir murmurer les choses aux oreilles de la jeune blonde.

- Je suis désolé de vous dire cela, mais Emy vient de nous quitter...Je suis Maxence Conrad, son petit fils, je peux vous aider en quelque chose ?

Il se frotta le cuir chevelu et se tourna pour récupérer une tasse propre. Max déposa une bonne quantité de café brulant dans la tasse et fit glisser celle-ci vers la jeune demoiselle. Il posa ses coudes sur le comptoir, il ne savait pas comment elle allait réagir, si elle devait proposer un mouchoir ou juste une épaule compatissante. L'ancien boxeur avait quitté la ville depuis longtemps, et ne savait pas ce qu'était devenue la vie d'Emy. Il ne connaissait pas ses amis, ses ennemis, et c'était un manque qu'il allait devoir comblé rapidement.

- C'est pour moi ! C'est pas le meilleur mais il tient chaud !

Elle était étonnée de ne pas voir Emy, elle lui avait pourtant téléphoné avant son départ pour New Carby, 5 jours auparavant pour la prévenir de la terrible nouvelle, et de son retour en ville. Emy, comme toujours, avait été emballé par le retour de Maureen, un peu peinée pour Roscoe, mais pas plus que ça. Emy était dans la confidence des affaires entre Roscoe et Maureen depuis des années et elle n’avait jamais porté d’énergumène dans son cœur. Mais combien de fois avait-elle suggéré à Maureen de regarder au plus profond de son cœur à elle... Elle soupçonnait un réel attachement entre les deux jeunes gens... Emy était une éternelle romantique et Maureen l’adorait pour ça. Et cette affection était réciproque, même si Maureen avait été déçue de ne pas avoir eut une visite de la propriétaire du Carby Grill, durant ses 5 jours passés au dispensaire.
L’homme, à l’allure si familière, vêtu d’un tablier taché d’huile et d’un torchon s’étant trop approché du feu, avait sourit en réponse à la jeune femme lorsqu’elle était entrée au Carby Grill. Elle l’observa servir deux cafés à deux hommes à l’allure bien virils et au verbe haut, puis elle l’observa se rapproché d’elle et c’est là qu’elle pu lui demander où se trouvait Emy. Cette question tétanisa celui qui semblait être le remplaçant d’Emy, puis il posa une des ses grande main sur celle de Maureen. Elle ne regarda même pas le jeune homme, juste sa main posée sur la sienne et son cœur s’emballa. Non pas que ce contact aille pu lui faire ressentir des choses, bien que cela faisait des années que quelqu’un n’avait pas fait ce genre de geste à Maureen. Mais elle avait un pressentiment...

-Vous voulez voir Emy ? Vous pouvez venir à côté ?

Elle le suivi du regard et se dirigea vers le bout du comptoir, comme le serveur le lui avait proposé. Cet endroit était l’endroit préféré de Maureen dans ce Grill. Elle s’installait toujours ici et Emy, entre chaque clients, venait papoter avec Maureen, se racontant les derniers potins, fustigeant certains, se moquant gentiment d’autre ou parlant du bel Angel qui faisait les yeux doux à Maureen... Maureen aimait cette place au comptoir, mais là, elle ressentait comme un malaise. Il s’approcha d’elle et lui annonça dans un murmure le décès d’Emy. Les jambes flageolant, Maureen n’entendit pas la suite de sa phrase, se posant sur l’un des tabourets qui était à côté d’elle, elle posa une main sur le comptoir comme pour s’empêcher de tomber. Elle avait du mal à respirer, une énorme boule de tristesse lui encombrait la gorge. Incapable de parler, incapable de pleurer, elle restait là à observer le jeune homme tout en prenant de grands respirations. Il déposa une grande tasse de café devant elle, et bien que l’odeur soit agréable, elle avait envie de vomir. Puis il se posta juste devant elle, de l’autre côté du comptoir, coudes sur le zinc il était à l’affut d’une réaction. Comme pour combler le silence entre eux, il lança :

- C'est pour moi ! C'est pas le meilleur mais il tient chaud !

Cette remarqua fit ressurgir le souvenir d’une conversation qui c’était tenue au même endroit bien des années auparavant. Maureen complimentait sans cesse Emy sur son café et elle se souvint de la remarque qu’elle faisait toujours. Dans un murmure, comme pour se souvenir, Maureen ne put s’empêcher de souffler :

- La cannelle, voila le secret d’un bon café !

Elle reprit peu à peu ses esprits et assimila la fin de la phrase que lui avait dit le serveur : “Maxence Conrad, son petit fils”. Voila pourquoi il lui semblait le connaitre. Emy, plus d’une fois lui avait parlé de son petit fils boxeur, et plus d’une fois elle lui avait fait lire des articles de journaux concernant ses victorieux combats. Elle était toujours très fière de son petit-fils, souvent inquiète également. Maureen, les yeux brillants, des larmes qui menaçaient de couler, posa son regard sur le petit-fils d’Emily et ne pu qu’esquisser un sourire :

- Max, tu es Max la menace ?

A l’expression qui envahi son visage, Maureen comprit que c’était bien lui. Et elle ressentit tout de suite une immense tristesse. Il avait perdu sa grand-mère, et même si elle n’était pas sûr qu’il soit proche d’Emy, il était au Carby Grill, il avait prit sa place. Elle reprit en le tutoyant, comme si elle le connaissait depuis longtemps :

- Je suis désolé, toutes mes condoléances pour ta grand-mère... Je... Comment ? Qu’est ce qui lui ait arrivé ?

Maxence n'aimait pas annoncer ce genre de nouvelles. Il avait beau avoir l'image de l'homme rustre, il aimait pas faire du mal surtout à une jeune fille. Le boxeur était de la vieille école, surtout élever par deux femmes à fort caractère, car chez eux jamais on ne lève la main sur une fille et jamais on ne la fait pleurer. Il remarqua la réaction de la jeune inconnue et il comprit qu'elle devait connaître sa grand mère. Il n'avait pas été un très bon petit fils, il n'était pas venu depuis des années. Il avait toute une vie de cette femme qui l'avait élevé qu'il ne connaissait pas.
Cette situation était encore plus embarrassante car il connaissait pas le visage triste en face de lui. Il savait ce qu'il pouvait dire aux gens proche d'Emy, à ceux qui étaient sa famille. Le grand brun essayait pourtant de faire marcher ses méninges. Il connaissait ce visage, il se rappelait d'avoir reçu des photos de sa grand-mère lors du dernier thanksgiving. Il avait une blonde sur plusieurs des photos, mais même en se concentrant il n'arrivait pas à mettre un visage sur ses photos.

Plus il y pensait et plus les choses disparaissaient dans son esprit et la jeune fille semblait troublée. Il ne voulait pas plus l'accabler avec des milliards de questions. La phrase sur la cannelle le piqua au vif alors qu'il passait un coup de torchon sur le comptoir. Il ne dit rien mais pensa très fort : " C'est ce que ma grand-mère aimait dire..."'. La situation était étrange et plus il plongeait ses yeux noisettes dans l'étrangère plus il ressentait un déjà vue, impossible à arrêter.
Elle le connaissait cela semblait une évidence. Elle connaissait ce bar-restaurant et surtout elle connaissait sa grand mère. Maxence n'était pas du genre à aimer réfléchir longtemps et l'allusion sur son petit nom fut comme un électrochoc.

- Oui c'est moi...Honnêtement on se connait ? Je veux pas être déplacé mais à qui ai-je l'honneur ?

Le nouveau propriétaire avait essayé de mettre toute la politesse qu'il pouvait offrir dans cette situation mais il manquait de patience. En même temps, il voyait bien l'émotion monter dans les yeux de biche face à lui. Le grand brun plongea une main dans son jeans et en sortit un mouchoir. Ce n'était pas n'importe quel mouchoir en papier, c'était un beau mouchoir en tissu avec ses initiales brodées sur le côté. Un cadeau de sa chère grand mère, Emy aimait broder des mouchoirs pour des personnes qu'elle aimait bien. Elle les offrait souvent lors d'anniversaire ou d'occasion.

- Tenez !

Maxy la menace n'ajouta rien de plus. Ce geste n'enlevait pas son impression d'être totalement perdu face à la jeune fille. Il lui manquait des pièces centrales de ce puzzle géant et il n'aimait pas cela. Le grand sportif aimait savoir dans quelle direction il allait. Ce qui était encore plus étrange, c'est qu'elle semblait complètement étrangère à la fin d'Emy. La presse avait pourtant relayer l'information, et cela avait fait les choux gras des pipelettes avides d'émotions fortes. Elle l'avait tutoyé, alors il fit de même car il n'aimait guère le vouvoiement au final.

- Je te remercie. Si tu es venue lui faire tes adieux...Nous l'avons enterrés samedi dernier, désolé. Elle a été emporté par une crise cardiaque, les urgences disent que cela été très rapide...Ils n'auraient pu rien faire. Cela me soulage pas ce genre de conneries de toubib prétentieux mais que veux tu ! Je reviens...

Une femme proche de la soixantaine venait de l'appeler pour une part de tarte au poire et chocolat à emporter. L'homme s'exécuta, tout en lâchant pas des yeux la blonde au bout du comptoir. Il découpa une part derrière une vitrine mobile, et l'enfourna dans une belle boite blanche en carton. Emy aimait beaucoup faire les choses en grand et avait commandé des macarons de papier pour agrémenter ses boites. Max colla l'un de ses macarons et ficela avec un long ruban de couleur mauve. C'était comme cela que sa grand-mère faisait et il était bien décidé à persévérer dans cette tradition.

- Voilà pardon ! Si madame Kerlerton n'a pas sa part de tarte, il pourrait avoir des morts ce soir !

Maureen essayait de contenir ses larmes, il n’était pas question qu’elle pleure. Elle qui c’était juré de ne plus jamais pleurer devant les gens de New Carby, voila qu’elle était une nouvelle fois au bord des larmes. Cette ville était maudite, elle ne la laisserait jamais en paix mais avant de partir elle voulait des réponses, des réponses concernant la mort d’Emy, et aussi savoir ce qui était arrivé au corps de Roscoe. Mais pour le moment la seule personne sur qui elle devait se concentrer était Maxence. Il n’avait pas répondu à ses questions, cherchant surement à sonder la personne qui se trouvait en face d’elle. Et il avait parfaitement raison. Puis après quelques secondes de silence, il avoua qu’il était bien le fameux “max la menace” mais cette affirmation fut teintée de suspicion. Et c’est légitimement qu’il lui demanda son identité. Cette question la fit frissonnée. Après l’épisode Roscoe au dispensaire, ou du moins après avoir halluciné de la sorte, elle avait un peu de mal à ne pas réagir à ce genre de question. En sortant, sa sensation d’être une étrangère dans la ville qui l’avait vu naitre était de plus en plus angoissante. Et une nouvelle fois, elle du souffler un bon coup pour ravaler ses larmes. C’est à ce moment précis que le jeune homme qui lui faisait face, tendit à Maureen un mouchoir. Et il lui expliqua calmement :

- Je te remercie. Si tu es venue lui faire tes adieux...Nous l'avons enterrés samedi dernier, désolé. Elle a été emporté par une crise cardiaque, les urgences disent que cela été très rapide...Ils n'auraient pu rien faire. Cela me soulage pas ce genre de conneries de toubib prétentieux mais que veux tu ! Je reviens...

Elle était abasourdie parce qu’elle apprenait, surtout qu’elle était persuadée de l’avoir eu au téléphone le soir de son départ, alors que d’après son petit-fils, elle était déjà morte. Essayant de reprendre ses esprit, elle fut interpellé par un homme qui quittait le Grill, elle le regarda s’en aller et entendit un groupe de jeune filles piailler derrières elle. Elles dissertaient sur l’étranger arrivé deux semaines plutôt, sur son allure super sexy et sur l’argent qu’il devait avoir. L’un d’elle avait parlé d’un logiciel qu’il avait créé et qui l’avait rendu riche. Une autre le comparait déjà à un futur Bill Gates. Maureen comprit que New Carby n’avait pas changé en fait. Les étrangers, surtout lorsqu’ils étaient séduisant comme le gars qui avait quitté le bar-restaurant, faisaient toujours de l’effet aux minettes du coin. Elle porta son attention sur le mouchoir qu’il lui avait tendu. Elle l’avait remercié d’un hochement de tête, l’avait posé à côté d’elle et l’avait écouté parler de la fin tragique d’Emily. Après considération, elle remarqua que ce n’était pas un vulgaire mouchoir en papier, mais un mouchoir bien particulier, brodé aux initiales du propriétaire. Pour Maureen ce fut la goutte d’eau. Incapable de parler, sa lèvre inferieure prise de tremblement, elle fut soulagée de le voir servir une cliente. Elle avala péniblement sa salive et, passant son index sur les initiales brodés, elle ne pu retenir une larme qui vint délicatement imbiber le mouchoir. Elle connaissait ces mouchoirs, Maureen en avait toujours un sur elle.

- Voilà pardon ! Si madame Kerlerton n'a pas sa part de tarte, il pourrait avoir des morts ce soir !

Elle sursauta lorsqu’il revint en plaisantant sur le cas Kerlerton. Confuse, elle baissa la tête, tentant d’effacer les larmes qui avait inondées ses joues, puis reprenant un peu de contenance, elle se dit intérieurement qu’elle n’avait pas le droit de craquer devant ce jeune homme. Elle savait que si elle commençait à pleurer, cela durerait surement un moment et qu’elle serait incapable de parler. Alors après avoir haussé les épaules, prenant une grande inspiration, elle releva la tête et:

- On ne se connait pas mais j’ai beaucoup entendu parler de toi. Emily est... était une grande admiratrice de ton jeu de jambe et de ton crochet du droit, répliqua-t-elle avec un léger sourire. Elle était tèrs fière de toi... On s’asseyait souvent là-bas, expliqua-t-elle en désignant le mur des Starlettes, et on discutait le soir, après la fermeture.

Elle aurait eu bien besoin de parler à Emy ce soir-là. Parler de l’accident, de Roscoe, de ces hallucinations... Ces quelques souvenirs heureux lui redonnèrent du courage et elle continua après avoir, une nouvelle fois, chassé des larmes qui humidifiaient ses yeux. Après hésitation, elle finit par se présenter, sans détours. En tendant la main par-dessus le comptoir, elle proclama :

- Je m’appelle Maureen Morgan. Emy était mon amie, ma confidente... ma seule alliée dans cette bourgade de ...

Elle ne pu finir sa phrase, fondant en larmes.

Une fois de nouveau près de la jeune inconnue, la tension émouvante était palpable. Le boxeur n'était pas du genre à pouvoir sortir une plaisanterie de son chapeau magique pour détendre l'atmosphère. Il sentait bien la détresse dans les yeux de son interlocutrice mais il ne pouvait rien faire. Le beau brun fit la moue en serrant les dents, tout en torturant le torchon entre ses mains.

- Je vois que tout cela te chagrine, je ne sais pas quoi te dire. C'est émouvant cette amour que tu avais pour elle, et elle devait avoir le même pour toi. Je ne sais pas si tu es croyante, mais je suis sur qu'elle est là haut maintenant et qu'elle nous observe. Elle prendra soin de toi à partir de maintenant, donc il ne faut pas être triste.

Le grand brun prit le temps de servir du café, il en avait besoin. Max n'était pas du genre à virer dans le sentimentalisme. C'était une protection pour ne pas souffrir, et jusqu'à aujourd'hui cela marchait plutôt bien. Cela ne l'empêchait pas d'être tiraillé par ce visage de chat abandonné sur le bas côté de la route. Il prit une gorgée du liquide noir aux arômes de cannelle alors qu'il vit l'étrangère fondre en larmes.
Maxence se sentit encore plus mal, et même si ne le connaissait pas, il ne pouvait laisser pleurer la jeune fille. La foule présente se tourna vers eux, et les personnes commencèrent à jaser. Pour y avoir vécu toute son enfance, le boxeur savait ce que ces regards pouvaient faire comme mal.

- Ne leurs faite pas ce plaisir Maureen...Cela te dit un café dehors ?

Il posa sa tasse, et lança son torchon sur son épaule. Maxy donna une petit tape sur le comptoir et se tourna vers Dolorès qui discutait avec les veuves Magguy. Il lui glissa quelques mots derrière l'oreille en montrant Maureen. La vieille femme lui sourit, et il passa dans la cuisine. Cela fut assez rapide, car ensuite il eut un hurlement, le bruit d'une assiette qu'on casse. Le grand sportif revint en poussant la porte battante. Il était maintenant recouvert d' une compote de pomme qui coulait le long de son visage.
Il s'essuya le visage nonchalamment, laissant en place le gros de la compote dans ses cheveux et sur son épaule droite.

- Ça c'est ma moitié, je vous présenterais après...

Pendant son absence dans la cuisine (courte), Dolorés lui avait préparé deux cafés à emporter. Elle lui glissa dans les mains et il quitta le comptoir. Maxence invita la jeune blonde à le suivre en ouvrant la porte du carby grill. Il marcha d'un pas assuré et tranquille, mais ne prononça aucun mot. La rue était calme et le nouveau propriétaire de " Chez Elmy", lui proposa l'un des café à emporter avec un grand sourire.

- Alors comment as tu connue ma grand mère ?

Elle était incapable de se contenir, elle avait pourtant essayé mais cela ne marchait pas. Et pour couronner le tout, un flot de souvenirs pénible lui revint en mémoire. C’était l’effet New Carby, jamais elle n’avait autant pleuré qu’en étant à New Carby. Elle repensait à la mort de ses parents, de son frère, à l’incendie du Ranch et la perte de Jason, de Lan, à son exclusion de la ville aussi. Elle entendit de façon lointaine Maxence lui expliquer qu’elle n’avait pas à leur faire le plaisir de pleurer en leur présence. Elle leva les yeux, et après un coup d’œil à droite, elle comprit qu’elle était en train de se donner en spectacle devant les commères du quartier. Ses sanglots se tarirent peu à peu, tête baissée, elle observait le comptoir avec attention.

Elle avait entendu Maxence parler de café ou quelque chose dans le genre et elle sursauta quand la main du nouveau gérant du Carby Grill vint frapper sur le comptoir. Elle observa le petit-fils d’Emy parler avec Dolorès, qui devait travailler au Carby Grill depuis toujours, puis ils dirigèrent leurs regards vers une Maureen au visage inondé de larmes. Elle tamponna ses yeux avec le mouchoir gentiment offert par Maxence. Il disparu quelques instants dans les cuisines, un grand fracas raisonna derrière les portes battantes puis l’homme réapparu couvert d’une mixture onctueuse et brillante qui ressemblait fortement à de la compote. En voyant Maxence dans cet état, elle en avait oublié de pleurer. Elle l’observa essuyer, ou plus précisément étaler ce qu’il avait sur le visage, l’entendit parler de sa moitié et après un nouveau passage en cuisine, il revint avec 2 cafés, à emporter. Il quitta son poste derrière le zinc et d’un mouvement de tête, invita Maureen à le suivre, ce qu’elle fit sans hésiter. Pour échapper aux regards, mais également pour prendre l’air et pour continuer à parler avec ce Max, elle attrapa son sac et passa devant lui alors qu’il lui retenait la porte.

Après quelques mètres parcourus en silence, il lui tendit un café en lui demandant comment elle avait connu sa grand-mère. Elle le regarda, alors que le soleil commençait à amorcer sa descente, au loin on entendait les cloches de la chapelle annoncer 18h. Elle ne pu retenir un rire franc et harmonieux, qui illumina son visage et fit pétiller ses yeux, alors que de la compote venait de dégouliner de la tête de Max pour atterrir sur son épaule. Sans un mot, elle s’arrêta, lui faisant signe de tenir son gobelet de café, puis trifouilla dans son sac à la recherche d’un objet... Elle en sorti un mouchoir dans les tons crème qu’elle fit virevolter, deux M brodées de fils blancs apparaissaient au coin du tissu. Elle lui tendit le carré de tissu et lui désigna du doigt son épaule maculée de purée de pommes, puis elle reprit son café. Elle en bu une gorgée avant de reprendre leur promenade puis elle dit enfin:

- Je l’ai connu y’a une dizaine d’années, enfin je la connaissais comme tout le monde, qui ne connaissait pas “Chez Emy”, mais j’ai vraiment appris à la connaitre qu’à mon retour de New York. Je revenais après quelques années d’études, j’avais hérité d’un Ranch et je l’ai transformé en centre pour jeunes en difficultés. Mais tout à mal tourné, mon projet n’a jamais été accepté par les gens du coin. Je t’apprendrais rien en te disant que certaines personnes dans cette ville, ont un esprit plus qu’étriqué. Bref, on m’a mit des bâtons dans les roues durant des mois et alors qu’il y avait de l’amélioration, le destin s’est encore une fois occupé de mon cas ! Le ranch à brulé, suite à l’explosion d’une poche de gaz naturel, juste en dessous de la propriété, et des personnes y ont perdu la vie... A l’époque, tout le monde m’a accablé, la raison de l’incendie était encore un mystère et bien entendu des mauvaises langues on fait courir le bruit que c’était un de mes jeunes qui avait mis le feu. La ville m’en voulait parce qu’un enfant du pays y avait perdu la vie, c’était mon meilleur ami... On m’a bien fait comprendre que je n’étais plus la bienvenue... J’avais l’impression d’être une sorcière de Salem, on aurait été à cette époque, j’aurais surement été brulée vive sur la grand Place !

Elle reprit un peu son souffle, tachant de refouler ce sentiment d’abandon qui lui tiraillait l’intérieur depuis des années, puis elle reprit :

- Ta grand-mère m’a toujours soutenue, dès mon retour de New York. Elle avait bien connu mes parents et elle me raconta énormément d’anecdotes sur eux, ce qui me permis de tenir et de garder le cap sur mes objectifs de l’époque. Elle devint très vite une confidente, une oreille attentive vers qui je pouvais me tourné pour discuter de trucs de filles,

dit-elle en souriant

J’ai perdue mes parents très jeunes et même si je n’étais plus une gamine, pouvoir se confier à une femme m’a été d’un grand réconfort. Surtout que ta grand-mère était douée pour ce qui était de réconforter les gens. C’était ce qui nous rapprochait je pense, nous avions cette même envie de venir en aide aux autres... Durant les 4 années qu’a durée cette aventure du Ranch de l’Espoir, elle a toujours été là pour moi ! Mais j’ai fini par quitter la ville, je n’en pouvais plus de cette haine qui planait au dessus de moi. La vie devenait impossible et je ne voulais pas qu’Emy aille des soucis par ma faute ! Cela faisait presque 1 an que je n’avais pas vu Emy et bien 6 ans que je n’avais pas mis les pieds à New Carby, je n’ai pas loupé mon retour au pays ! C’est moi qui ai fracassé le panneau de bienvenue !

Elle se mit à rire, rire de l’ironie de la situation, rire en pensant à la réaction d’Emy. Elles auraient surement bien rigoler toutes les deux...

Maxence était sortit du Carby Grill sans réfléchir plus loin que d'arrêter les larmes de Maureen. Cette femme qu'il ne connaissait pas mais qui lui laissait une curieuse impression. Un fourmillement monta le long de sa nuque et s'intensifia autour du lobe de son oreille gauche. Cette sensation là, au moins, il la comprenait. Le boxeur l'avait depuis tout petit, un fourmillement pour souligner ses intuitions qu'on peut avoir dans des moments précis; Où on ne prends pas le bus, et qu'on apprend une heure plus tard qu'il y a eu un accident, où qu'on appelle un proche et se rendre compte qu'il lui est arrivé quelque chose.

C'était cette démangeaison qu'il expérimentait actuellement. Le grand brun ne pouvait l'expliquer mais il s'inquiétait pour la demoiselle. La rue autour d'eux était plutôt calme, un groupe de petite fille avec des ballons rose se détachèrent. La première des trois enfants, glissa entre les deux promeneurs avec leurs cafés. La deuxième et la troisième percutèrent les jambes du Boxeur. Il les regarda avec tendresse avant de les laisser passer en leurs caressant leurs petites têtes blondes.

Il remarqua aussitôt le mouchoir que la jeune femme sortit de son sac. Maxy accepta en rendant son café, et hérita d'un beau carré de tissu qui ressemblait étrangement à ceux que sa grand-mère. Ceux qu'elle aimait broder au coin du feu avant de s'endormir après une bonne journée de travail. Il se souvenait qu'il aimait mettre sa tête, enfant, sur son rocking-chair alors qu'elle était emmitouflée dans son grande couverture orange. La vieille femme excellait un doux parfum enivrant et sucré, de lavande et de sirop d'érable. La sensation qui arriva avec les effluves du mouchoir de Maureen retourna le grand sportif au point de le stopper dans sa marche.
Il renifla et eu l'impression de revenir vingt-ans en arrière et il ne put s'empêcher de penser : " Tu aimais broder tes mouchoirs grand mère. Mais je sais que tu ne les donnais pas à n'importe qui, c'était un cadeau pour toi. Est-ce que c'est parce que je ressens que tu as été très proche de cette jeune fille, qui me donne envie de me rapprocher ? "

- Maureen je ne peux pas accepter...Je ne peux pas salir ce souvenir que tu as d'elle. Il déposa le mouchoir dans le creux de sa main. Il déposa son café sur le trottoir et commença à soulever son tee-shirt. - Regarde, cela va être plus simple...

Maxence retira son tee-shirt, laissant apparaître ses muscles saillant, ses pectoraux parfait couvert de son petit duvet qui descendait en crescendo le long de son torse. Il roula son tee-shirt en boule et le frotta entre ses mains, la compote avait été remplacé par une monstrueuse tache jaune et marron. Le nouveau propriétaire du carby grill remit son tee-shirt, récupéra son café et montra le jolie parc face à eux. L'automne était en marche et les feuilles recouvraient les bancs. Un couple de vieux amant se serait l'un contre l'autre avant de disparaître au loin. Max montra l'un des bancs et alla s'asseoir en montant sur le rebord et écouta patiemment Maureen.

- Et bah je comprends qu'avec tout cela ! tu en es gros sur la patate... Il sourit en buvant une gorgée du café à la cannelle. Tu sais, je pense qu'elle aurait été très fière de toi, car elle m'a élevé toute seule après que ma mère est perdue la tête. Pourtant, avec le restaurant, les soucis à la banque et l'éducation d'un adolescent, elle gardait le sourire. Elle aimait les gens qui se donnaient à fond dans la vie, qui fonçaient malgré les dires et les obstacles. Et, je comprends que vous soyez devenus amies, car je pense que quand deux personnes se ressemblent. Il y a une force qui les rapprochent, pour que les difficultés soient moins tranchantes, et les regrets moins amères. Tu dis qu'elle t'a beaucoup donné, mais je pense que tu lui as beaucoup apporté, car au final elle était bien seule. Elle avait une fille enfermée dans un mouroir à Sedona, un petit fils qui ne donnaient de nouvelles que pour les grandes occasions. Pour le reste de la famille, j'en parle pas...Donc sache que tu as du la rendre très heureux sinon elle ne t'aurait pas offert ce mouchoir.

Il montra le carré de tissu que Maureen avait sortit de son sac quelques minutes auparavant. Le boxeur termina son gobelet et se leva pour le jeter dans la poubelle la plus proche. Il revint et fit face de toute sa carrure devant la jeune blonde. Il se pencha et avec un grand sourire, prit une inspiration et reprit de plus belle.

- Je pense qu'il faut pas baisser les bras Maureen. Tu sais pour la boxe c'est finit, pour des raisons qui me sont propre. Et, maintenant que je suis ici, j'ai bien l'intention de reprendre ce restaurant. C'est ville à besoin de changement, et c'est très bien que tu es emboutie le panneau à l'entrée de la ville, c'est un signe. Tout ce que tu as essayé de faire, cela c'est mal passé, d'accord. Mais c'est le passé et tu dois te focaliser sur le futur maintenant. Qu'est ce que tu as envi de faire ? Tu sais malgré ce que tu penses, je pense que cette ville à besoin de sang neuf. Il ne tient qu'à nous d'en faire une ville meilleure. Tu as un endroit où dormir ? Tu résides chez quelqu'un ?

Après avoir parlé un peu de sa vie, mais surtout de la relation privilégiée qu’elle entretenait avec Emy, Maxence fit signe à Maureen de le suivre jusqu’au petit parc qui trônait au milieu de la grand place. Et pendant qu’elle s’assit, elle ne pu détourner le regard de cet homme à la fois gentil et séduisant. Elle repensa à ce qui venait de se passer quelques minutes auparavant, lorsqu’il avait refusé de prendre le mouchoir et qu’il avait offert à la jeune femme un spectacle à la fois déroutant et très agréable.

Elle avait été vraiment surprise de voir ce torse nu, aux muscles extrêmement bien dessiné, apparaitre comme par enchantement. Plus d’une fois elle avait vu ce corps de rêve sur les photos d’Emy, mais le voir en vrai, devant soi, c’était un spectacle épatant. Elle n’avait pas loupé une miette de ce débarbouillage dans les règles et pendant qu’il s’était essuyer la figure, Maureen avait prit le temps de le détailler. Elle n’était pas du genre “croqueuse d’homme” qui reluque tout les mecs, à l’affut du moindre beau gosse qui passe. Loin d’avoir ce genre de hobbies, Maureen était observatrice, elle aimait les belles choses, les beaux paysages, les jolies moments, et le corps qui c’était dévoilé devant elle était une belle chose. Elle c’était attardée sur ces muscles abdominales oblique, elle aimait cette partie du corps d’un homme, cet endroit proche de la ceinture qui bien dessinée donnait cette forme si particulière et que Maureen trouvait extrêmement sexy. C’est pour se donner une contenance et pour essayer de chasser cette chaleur qui l’avait envahi, qu’elle avait parlé, et parler encore d’Emy.

Maxence était assis sur le rebord du banc, Maureen avait fait virevolter quelques feuilles avant se s’asseoir à son tour sur le banc, son café dans une main, son sac à l’épaule et le mouchoir dans l’autre, qu’elle serrait. Emy lui manquait à cet instant précis, elle aurait tellement voulu que ce soit elle qui les présente. Elle détourna son regard vers la gauche et du lever les yeux pour pouvoir le voir prendre une gorgée de café en souriant, alors qu’il venait de lancer une expression qu’elle trouvait rigolote. Puis il retrouva son sérieux quand il lui dit :

-Tu sais, je pense qu'elle aurait été très fière de toi, car elle m'a élevé toute seule après que ma mère est perdue la tête. Pourtant, avec le restaurant, les soucis à la banque et l'éducation d'un adolescent, elle gardait le sourire. Elle aimait les gens qui se donnaient à fond dans la vie, qui fonçait malgré les dires et les obstacles. Et, je comprends que vous soyez devenus amies, car je pense que quand deux personnes se ressemblent. Il y a une force qui les rapprochent, pour que les difficultés soient moins tranchantes, et les regrets moins amères. Tu dis qu'elle t'a beaucoup donné, mais je pense que tu lui as beaucoup apporté, car au final elle était bien seule. Elle avait une fille enfermée dans un mouroir à Sedona, un petit fils qui ne donnaient de nouvelles que pour les grandes occasions. Pour le reste de la famille, j'en parle pas...Donc sache que tu as du la rendre très heureux sinon elle ne t'aurait pas offert ce mouchoir.

Ce petit monologue toucha énormément Maureen qui serra encore plus fort le mouchoir d’Emy. Elle ne voulait pas pleurer, pas encore, et surtout pas devant lui, mais ce qu’il avait dit était tellement chargé d’émotions qu’elle eut beaucoup de mal à refouler les larmes qui voulaient s’échapper de ses yeux brillants. Elle respira un bon coup, tandis qu’il allait jeter son gobelet de café. Mais elle eut à peine le temps de reprendre ses esprits qu’il se plaça devant elle, imposant. Obligée de relever la tête pour le regarder, il se pencha, et il reprit son discours :

- Je pense qu'il faut pas baisser les bras Maureen. Tu sais pour la boxe c'est finit, pour des raisons qui me sont propre. Et, maintenant que je suis ici, j'ai bien l'intention de reprendre ce restaurant. C'est ville à besoin de changement, et c'est très bien que tu es embouti le panneau à l'entrée de la ville, c'est un signe. Tout ce que tu as essayé de faire, cela c'est mal passé, d'accord. Mais c'est le passé maintenant et tu dois te focaliser sur le futur maintenant. Qu'est ce que tu as envi de faire ? Tu sais malgré ce que tu penses, je pense que cette ville à besoin de sang neuf. Il ne tient qu'à nous d'en faire une ville meilleure.

Tout comme elle, il pensait que cette ville avait besoin de changement, et cela lui fit chaud au cœur. Et comme s’ils se connaissaient depuis des lustres, il parla en leurs noms à tout les deux pour exprimer son envie de voir sa ville, leur ville, devenir meilleure. Mais ce qui avait le plus retenue l’attention de Maureen, ce fut le fait qu’il parle d’un signe. La jeune femme était très attachée aux coups du destin, et cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas tenté de “chercher les signes”. Elle aimait chercher et trouver une signification dans chaque petit évènement qui venait ponctuer son quotidien. Mais en quittant New Carby, elle avait aussi abandonnée cette manie. Et cette simple phrase scella une certaine confiance en cette personne qui était quasiment accroupie devant elle et qui lui demandait si elle avait un endroit où dormir. Cette question était pleine de sous-entendu. Elle ne savait pas quoi penser de cet homme si gentil. Cela faisait des années qu’une personne n’avait pas tenté de lui venir en aide et cela lui faisait un peu peur. Elle se méfiait tellement du genre humain qu’elle avait beaucoup de mal à faire confiance, surtout lorsqu’il s’agissait d’un inconnu. Mais elle connaissait cet homme, enfin pas vraiment mais c’était tout comme. Elle préféra mettre un frein à ce flot de gentillesse, car même si elle appréciait ce que Max faisait, elle ne voulait pas lui être redevable, c’était bien trop tôt, elle ne le connaissait pas assez bien. Elle fini par répondre à sa question après avoir prit la peine de finir son café et après l’avoir imité, allant à son tour jeter son gobelet. Cela lui permit d’échapper à son regard. Elle revint près du banc mais resta debout, un peu nerveuse, déformant quelque peu la vérité:

- J’ai pris une chambre au Borro Jim Motel !

Enfin elle allait le faire mais elle ne voulait pas être prise au dépourvu. Elle n’aimait pas mentir, alors pour échapper aux yeux châtains du jeune homme, elle balaya de ses bottes en cuir, les feuilles amassées par terre, puis elle continua :

- Je voulais m’excuser pour les larmes tout à l’heure. Je n’aurais pas du craquer comme ça, c’est juste que... Tout me tombe dessus d’un seul coup et j’ai un peu de mal à faire le tri. Merci pour le café, Maxence, il est vraiment délicieux.

Elle retourna s’asseoir sur le banc et regarda la ville qu’elle aimait et détestait tant à la fois. Elle se retrouvait au point de départ. Elle prit conscience qu’elle était à un tournant de sa vie, elle pouvait prendre ses jambes à son cou et s’enfuir. Ou bien affronté ses peurs et restée dans cette ville, dans sa ville et faire face. Elle ne croyait pas spécialement à Dieu et encore moins aux anges et autres esprits surnaturel, mais alors qu’elle observait la grand place, depuis ce banc, elle ressentit comme une présence. Emy veillait-elle sur elle depuis là-haut, elle n’y croyait pas, mais ce qu’elle ressentait était étrange. Cette présence quasi surnaturelle lui fila des frissons et elle se releva précipitamment :

- L’automne est déjà là... C’est beau ici... Les festivités de l’Epouvantail ont toujours lieu ?

Pourquoi parler du temps, pourquoi parler de cette fête, elle n’en avait aucune idée mais c’est la première chose qui lui vint à l’esprit et elle avait besoin de parler pour éviter de se questionner sur cette sensation qui lui donnait des frissons.

Le regard de Maureen sur son corps, il ne l'avait pas remarqué. Car pour le remarquer, il fallait que son acte soit intentionnel, que par celui-ci il essaye d'attirer son attention. En effet, Maxence n'avait aucun problème avec son corps et la nudité. Il n'hésitait pas à faire tomber la chemise en privé, comme en public (quand cela lui semblait nécessaire; comme aider dans ses travaux de déménagement, une de ses connaissances new-yorkaises. Ou détruire un mur porteur dans l'appartement de sa voisine, Madame Mckuslky). Mais ce n'était pas son attention de séduire la belle blonde face à lui avec ce qu'il considérait comme simplement une enveloppe. Max était tellement loin de tout cela qu'il avait remis son tee-shirt avec son air candide, l'air de rien.

Lors de ses longs monologues, il avait parlé avec franchise ce qui n'était pas jamais facile pour lui. Il cherchait actuellement toujours les mots pour dire simplement : " Je t'aime " à la personne qui partageait sa vie. Dans sa tête, les choses étaient toujours élémentaires, mais quand il s'agissait de les exprimer, le grand sportif avait l'impression de se retrouver dans un marécage. Il s'enfonçait sans pouvoir se défaire et préférait rester là sans bouger pour attendre sa fin (ou la fin d'une histoire). Pour autant, avec cette jeune inconnue qu'il ne connaissait pas, il avait parler avec son cœur et cela avait été facile. Il ne savait pas pourquoi mais il se sentait le devoir de partager ce sentiment d'espoir. Celui-ci même qui lui permettait chaque jour d'espérer une fin heureuse à sa propre histoire.

- J’ai pris une chambre au Borro Jim Motel !
- Tu souhaites rester longtemps ? Car l'hôtel c'est par forcement très chaleureux. Tu devrais chercher dans les maisons aux alentours, s'ils ne louent pas des chambres.

Le grand brun se rendit compte trop tard de la familiarité de ses questions. Il s'en voulait maintenant, car ils ne connaissaient pas. Pour avoir vécu à New-York, dans la même situation il aurait surement pris un coup de spray au poivre dans les yeux, et un coup de pied dans les bijoux de famille. On ne pouvait plus faire confiance à personne de nos jours. Max savait que dans cette société, s'inquiéter pour une inconnue cachait des sombres envies pour certaines personnes. Et, pour les autres, rendre service attendait forcément quelque chose en échange. L'homme aux yeux noisettes ne pouvait lutter contre cela, comme il n'allait pas s'excuser de vouloir apprendre plus de Maureen.

- Je te met mal à l'aise, c'était pas ce que je voulais.

Il commença à rebrousser le chemin déjà parcouru. Il fit un petit signe de tête à la jeune femme ne voulant pas qu'elle attrape froid, à rester trop longtemps sur son banc. Max l'attendit donc s'amusant à boxer les feuilles volantes devant son passage. Il se tourna alors vers elle, tout en marchant.

- Je sais que cela te parait bizarre, un inconnu qui te demande des choses assez personnelles. Mais je te rassure, il n'y a pas de mauvaise attention, je souhaite pas avoir ton numéro pour t'inviter à diner.

En quittant le parc magnifiquement habillé par les couleurs automnales, il s'arrêta devant le passage bientôt. Un petit garçon qui semblait avoir fait une course à l'épicerie, avait peur de traverser. C'est vrai qu'ici à New Carby, les gens pouvaient rouler vite. Maxy prit position sur le passage piéton pour laisser passer l'enfant qui le remercia par un grand sourire.

- Pardon, donc je disais...Je suis pas là pour te faire peur, ou te dire quoi faire de ta vie. Peut être dans quelques minutes on va se séparer et on se reverra plus. Pourtant cela ne m'empêchera de me demander ce qu'elle devient Maureen Morgan. Je crois aux signes et je pense que c'est pas un hasard cette rencontre et je suis sûr qu'on se reverra.

Dans leurs marches, il n'avait pas quitté les yeux de son interlocutrice, car il ne voulait pas qu'elle doute de ses paroles. Il s'arrêta devant le Carby Grill, son lieu de travail qu'il appréciait un peu plus chaque jour. Maxence respira profondément et sentit un pincement à la poitrine. Il fit comme si de rien n'était et se posa contre le mur derrière lui avec un grand sourire.

- Cette porte en tout cas restera ouverte quoi qu'il arrive. La douleur fut plus intense et il perdit son sourire. Que tu veuilles manger ou discuter, je pense que c'est toi maintenant qui doit savoir si tu veux me laisser une chance de... Il sentit comme un coup de poignard dans sa poitrine et se recroquevilla en se tenant le tee-shirt. De me faire confiance ou non...

Un hôtel n’était pas un endroit chaleureux, Max avait raison. Surtout le Borro Jim Motel, avec son réceptionniste au regard lubrique et toutes les légendes urbaines entourant cet établissement... L’idée émise par son interlocuteur, de se renseigner sur les maisons alentours était une bonne idée. Même si elle craignait de ne pas être acceptée dans ce genre d’auberge, supposant que sa réputation serait un frein à une future demande.

Max se méprit sur la réaction de Maureen lorsqu’elle se releva. Elle aurait voulu lui dire que son mal venait de l’étrange sensation qu’elle avait ressentie, mais elle garda le silence. Elle ne voulait pas qu’il la prenne pour une cinglée. Après un petit signe de tête l’invitant à le suivre, ce dernier tenta de le rassurer sur ses intentions. Déçue par la remarque bien que soulagée de sa compréhension. Cela faisait des années qu’elle n’avait pas échangé de numéro de téléphone avec un homme, des mois qu’elle n’avait pas été invitée à diner par un homme. Et si Max l’avait invité, elle aurait accepté tout de suite. Surtout après l’avoir entendu parler d’Emy, de lui avoir fait comprendre qu’il voulait simplement la connaitre et encore plus, lorsque quelques instants plus tôt, il avait aidé un gamin à traverser la rue. Max irradiait de bonté et Maureen se surprit à rêver d’un homme tel que lui, passant le reste de sa vie auprès d’elle.

Maureen avait marché en regardant ses pieds et à chaque fois qu’elle levait les yeux, elle avait croisé ceux de Maxence. Ce qui était un peu déstabilisant pour la blondinette, peu habituée à être le centre d’attention. Quand enfin ils arrivèrent devant le Carby Grill. Il avait commencé à parler mais Maureen ne l’écouta pas, elle l’observait et comprenait que quelque chose n’allait pas. Elle avait tenté de le soutenir mais il était bien trop lourd pour lui. Alors elle hurla à l’attention des clients du Grill afin qu’ils viennent l’aider. La serveuse qui occupait le poste depuis des dizaines d’années fut la première à sortir. Maureen lui demanda de rester avec lui et en moins de 2 minutes, elle revint accompagnée d’un médecin et de deux infirmières poussant un brancard. Elle avait quitté le dispensaire quelques heures plus tôt et voila qu’elle y retournait.

La dernière fois qu’elle avait été au chevet de quelqu’un, c’était Lan, juste après l’explosion du ranch, et cela lui rappela de très mauvais souvenirs. Assise dans la salle d’attente, elle surprit une conversation concernant l’état de santé de Max. L’un des médecins soupçonnait une crise cardiaque et un interne penchait pour une simple crise d’angor. Puis elle les avait écoutés parler de dérivés nitrés, d’électrocardiogramme stable, de trinitrine, etc... Quelques minutes plus tard, une infirmière l’ayant reconnue, annonça à Maureen qu’elle pouvait aller voir son fiancé... Maureen se souvint que Max avait parlé de sa moitié, une femme peu commode qui lui avait balancé de la compote sur la tête. Elle expliqua à Maureen que Max n’était pas son petit-copain et qu’il fallait prévenir l’amie du patient au Carby Grill.
Elle alla toquer à la porte et c’est un Max à la voix affaiblit qui lui répondit d’entrer. Après quelques hésitations, il avoua à Maureen qu’il avait des problèmes cardiaques, que c’était pour cela qu’il avait arrêté la boxe et il fit promettre à celle-ci de ne jamais divulguer son secret. Elle le lui promit et quelques instants après un homme au visage inquiet et aux yeux clairs, entra dans la chambre. Il ne considéra pas une seconde Maureen et se plaça devant elle, pour serrer très fort la main de Max. La seconde suivante, ils s’embrassèrent et Maureen comprit que la moitié de Max n’était en aucun cas une femme !
Elle les laissa seuls... Mais se promit de téléphoner au Carby Grill dès le lendemain pour avoir des nouvelles de Maxence Conrad, petit fils d’Emy Danes.